Comparutions immédiates
Le président appelle le prévenu numéro 16 : monsieur Fatou N’Goun. Un grand gars costaud aux épaules voutées s’avance d’un pas lourd et s’appuie à la barre. Ses dreadlocks grisonnantes attachées en catogan lui donnent un air de rasta nostalgique et rangé. Il comparaît pour détention de stupéfiants.
« – Vous êtes né en 1965 en Gambie. Vous êtes de quelle nationalité Monsieur ?
– Sénégalais.
– Un jour Sénégalais, un jour Gambien, ça varie, on ne sait pas bien. Qu’est-ce que vous avez comme papiers ? »
Une pièce d’identité circule de main en main sous le regard curieux des magistrats. Sourire moqueur aux lèvres, le procureur commente la carte en aparté avec un gendarme. Le président poursuit déjà :
– Vous avez 19 condamnations au casier. Vous comparaissez pour transport, détention, acquisition et usage illicite de stupéfiants. Vous êtes marié à Melle Renaud, vous avez un enfant.
– Oui de 7 ans et demi.
– Vous êtes ouvrier dans le bâtiment, j’ai là les bulletins de salaires. La drogue vous y touchez ?
– Même si j’ai rien sur moi, ils auraient trouvé quelque-chose.
– Vous avez été pris avec deux grammes de cannabis et un gramme d’herbe.
– L’herbe c’est à moi mais pas le cannabis. C’est le policier qui m’a montré l’enveloppe.
– En tout cas faudra vous calmer, ça commence à faire ! Vous travaillez actuellement ?
– Oui, là j’ai deux bulletins de salaires. »
Au tour du procureur qui lance d’une voix aigre : « Oh, il peut toujours avoir deux bulletins de salaire, les faits n’en sont pas moins constitués ! Et après 19 condamnations. Je demande 2 mois fermes ! »
Le tribunal préfère une amende : 500 euros.